Récupérer les bénéfices d’une assurance-emprunteur, est-ce possible ?

Aujourd’hui, en prenant un crédit, qu’il soit à la consommation, personnel, automobile ou immobilier, il est difficile d’échapper à l’assurance collective ou assurance-emprunteur; exigée par la plupart des établissements de prêt, elle permet de couvrir et le préteur et l’emprunteur d’un éventuel décès, accident entraînant l’incapacité de travailler et parfois même la perte d’emploi.

Évaluation des risques et sur-facturation

Pour l’assureur, il va falloir tenter d’évaluer au mieux les risques encourus par son futur assuré, ce qui n’est pas forcément aisé.

Immanquablement ceci se répercute sur le prix final de la prime et tend vers la surévaluation de celle-ci.

On peut dès lors penser que ces primes versées par l’ensemble des emprunteurs excèdent fortement, au final, les sinistres à rembourser. Selon les calculs de l’UFC-Que Choisir, les contrats d’assurance emprunteur dégageraient un surplus représentant 46% de la prime (après déduction des frais de gestion et d’administration ainsi que du paiement des sinistres) soit, d’après ces calculs, plus de 11 milliards d’euro depuis 1996.

Une loi pour récupérer cette sur-facturation ?

L’article L331-3 du Code des assurances dispose que « les entreprises d’assurances sur la vie ou de capitalisation doivent faire participer les assurés aux bénéfices techniques et financiers qu’elles réalisent dans les conditions fixées par arrêté du ministre de l’économie et des finances ».

Sur cette base, certaines associations de consommateurs (comme justeprime.org par exemple) sont montées au créneau pour tenter de récupérer ces bénéfices car en pratique, dans la plupart des cas, ces derniers sont allés emplir les caisses des banques et autres organismes préteurs. Banques qui assurent ne pas avoir enfreint la loi puisque, dans une grande majorité de cas, ce sont elles qui ont souscrit pour l’emprunteur à l’assurance-emprunteur.

Robert Bret, sénateur des Bouches-du-Rhône, à même interpellé le gouvernement à ce sujet le 16 juillet 2007. Il estime que compte tenu des sommes en jeu et du nombre très important de victimes, il importe que de plus amples investigations soient menées, et en cas de confirmation que le préjudice subi par les millions de ménages soit intégralement réparé.

Une démarche « collective » et des espoirs

Un grand nombre de souscripteur à un contrats d’assurance groupe ayant signé un contrat de crédit immobilier ou un contrat de crédit consommation auprès d’un établissement bancaire ou d’un établissement de crédit ont, après l’appel de l’UFC-Que Choisir, envoyé une lettre type à leurs compagnies d’assurance respectives réclamant la participation aux bénéfices afin de faire pression sur ces derniers qui ont répondu négativement à ces demandes.

Parallèlement, le 22 mai 2007 et le 18 septembre 2007, l’UFC-Que Choisir a assigné en justice devant le Tribunal de grande Instance de Paris, à côté de deux consommateurs, la CNP et la Caisse d’Epargne pour avoir violé le principe légal de la participation des assurés aux bénéfice ainsi que la CNP et la société COFIDIS pour les crédits à la consommation.

L’optimisme est de mise pour les plaignants mais la réponse émanant de Bercy le 3 janvier 2008 à la question de Robert Bret risque de tempérer les enthousiasmes (voir plus loin).

Le ministère de l’économie, des finances et de l’emploi argue, en clair, que la loi ne s’appliquerait que l’obligation de reverser le trop perçu ne s’appliquerait que « globalement » et pas « individuellement ». Autrement dit sous forme de baisses sur les primes mais de façon globale. L’assureur restant libre de faire figurer ou pas sur le contrat une éventuelle participation aux bénéfices de l’assuré.

Quoi qu’il en soit, ce sera à la justice de trancher la question et la procédure risque d’être difficiles à faire aboutir. La patience ne sera pas forcément payante mais dans tous les cas, le résultat des procédures en cours fera jurisprudence.

Attendre et voir, donc, comme disent nos amis anglo-saxons

Réponse du Ministère de l’économie, des finances et de l’emploi JO Sénat du 03/01/2008 – page 26

L’article L. 331-3 du code des assurances dispose que « les entreprises d’assurances sur la vie ou de capitalisation doivent faire participer les assurés aux bénéfices techniques et financiers qu’elles réalisent dans les conditions fixées par arrêté du ministre de l’économie et des finances ».

Cette disposition résulte de l’article 4 de la loi de finances pour 1967 qui s’insérait dans une politique d’incitation à l’épargne à travers le développement de la capitalisation et des assurances sur la vie. Les arrêtés d’application de cette disposition ont été codifiés aux articles A.331-3 et suivants du code des assurances.

L’article A.331-4 en vigueur jusqu’au 22 avril 2007, qui résultait de l’arrêté du 21 décembre 1984, prévoyait en son alinéa 2 que « le montant minimal de cette participation est déterminé globalement pour les contrats individuels et collectifs souscrits sur le territoire de la République française, à l’exception des contrats collectifs en cas de décès ».

La loi sur la participation aux bénéfices codifiée à l’article L. 331-3 du code des assurances, et précisée à l’article A.331-4 du même code, crée pour les entreprises d’assurance une obligation de faire participer globalement la mutualité des assurés aux bénéfices techniques et financiers réalisés, mais n’accorde pas un droit individuel à chaque souscripteur de contrat d’assurance sur la vie.

L’entreprise d’assurance est libre, sauf disposition contractuelle particulière, de déterminer les modalités ainsi que la liste des contrats bénéficiant de la participation aux bénéfices définie réglementairement. Seuls les termes particuliers du contrat peuvent donc, le cas échéant, en application de l’article L. 132-5 du code des assurances, déterminer des obligations de participation aux bénéfices à l’égard du souscripteur ou de l’adhérent à ce contrat.

Les tribunaux ayant été saisi tant par des associations de consommateurs, des professionnels et leurs associations représentatives, il convient de laisser la justice se prononcer dans ces litiges opposant des personnes privées.

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